Chef de file et poète le plus éminent du groupe de la Pléiade, poète officiel du roi, prince des poètes, Ronsard est aussi le premier poète français moderne. Figure de proue de l’humanisme français, il puise les principes de sa philosophie dans la culture de l’Antiquité classique. Ronsard participe à l’avènement d’une mentalité nouvelle, ouverte et progressiste, qui va marquer profondément le 16e siècle. Il rompt avec le passé en substituant au memento mori, devise du moyen âge, le memento vivere de la Renaissance. Dans sa poésie, il s’interroge constamment sur le sens de l’existence en abordant des questions éternellement humaines, qui sont aussi les thèmes traditionnels de la sagesse antique : la fuite du temps, la brièveté de la vie, la fragilité de toute chose, la finitude de l’homme. Conscient que la mort met un terme irréversible à la vie humaine, il exhorte ses contemporains à profiter au maximum de leur existence et à rechercher de façon raisonnée les jouissances qu’elle peut offrir.
Sa poésie est une invitation à croquer la vie à belles dents, suivant le précepte de base de l’épicurisme antique : Carpe diem. Or, cueillir le jour, ce n’est pas s’adonner à un plaisir excessif et incontrôlé, mais c’est jouir de la vie comme si on cueillait et croquait une pomme juteuse ou bien comme si on laissait une praline fondre lentement dans sa bouche. Cultiver les aspects jouissifs de la vie, c’est donc pratiquer un hédonisme pondéré, c’est goûter un plaisir modéré, c’est se délecter de la vie en procédant comme si on savourait un bon repas, dégustait un bon vin ou humait une belle fleur. Ainsi, la pensée ronsardienne illustre à merveille la douceur de vivre typiquement française.
Ronsard cultive avec succès le sonnet pétrarquiste et l’ode, des genres fort en vogue à la Renaissance. Ses poèmes abondent en références à la mythologie antique. A côté de ses oeuvres lyriques et méditatives, Ronsard a aussi écrit des textes engagés. Il y prend position face à la profonde crise morale et politique de son temps, en condamnant notamment les excès intolérables des guerres de religion.
Touche personnelle :
En ayant choisi Ronsard comme personnage à incarner, j’ai cherché à retrouver à travers lui un peu de cette prédilection que j’éprouve pour la Renaissance, avec sa culture, sa mentalité, sa philosophie et sa poésie humanistes. Mais j’apprécie Ronsard plus particulièrement encore pour une autre raison. Lorsqu’on fixe son choix sur un personnage, on retrouve en lui souvent un peu de soi-même. Ainsi, Ronsard a passé toute son enfance au milieu de la nature et il est resté solidement enraciné dans sa terre natale dont il célèbre les divers aspects comme la rivière Loir, la fontaine Bellerie ou la forêt de Gâtine, toutes proches de sa demeure familiale. Il a chanté la nature et peut être considéré comme un écologiste avant la lettre.
Ce qui me rapproche encore de Ronsard, c’est l’attrait que j’éprouve pour la Vallée de la Loire avec ses beaux châteaux en pierre blanche, nichés dans de riants paysages de rivière. Parmi ceux-ci, il y a la Possonnière, lieu de naissance du poète. J’ai la chance de pouvoir effectuer plus ou moins régulièrement des séjours dans un château de la Loire qui appartient à un de mes amis. Ainsi, moyennant un petit détour, il m’arrive souvent de faire à la même occasion une visite du manoir natal de Ronsard. A son retour d’Italie, le père de Ronsard l’avait érigé (1515), peu d’années avant la naissance du futur poète (1524). Différentes façades sont ornées de belles statues ainsi que d’inscriptions françaises et latines. Cette gentilhommière est une des premières demeures de France sur lesquelles on retrouve l’influence de la Renaissance italienne. Dommage que ne s’y trouve pas une de mes devises favorites, qui correspond exactement à la philosophie ronsardienne : Male vivunt qui se semper victuros putant (Ceux-là vivent mal qui croient vivre éternellement).
Jeannot Nehrenhausen
|
|
|
|
Photo 1: Le château familial des Ronsard, dans le petit village de Couture-sur-Loir, dans l’arrondissement de Vendôme. Vue prise de la cour intérieure.
Photo 2: Le manoir de la Possonnière avec son parc dégage un charme discret et subtil. Noyé dans un cadre de verdure, où domine un jardin de roses, il est plongé dans une ambiance intimiste, qui n’a rien du genre tapageur de certains grands châteaux de la Loire. La Possonnière se trouve dans le canton de Montoire-sur-le-Loir, près de Vendôme (à 30 km), dans le département du Loir-et-Cher, dont la capitale est Blois (à 60 km). Précisons que le Loir (317 km) est une rivière, un sous-affluent de la Loire, qui est un fleuve (1.012 km).
Photo 3: Dans la roseraie du château de Ronsard.
|